A partir du cas spécifique que constitue le système politique européen, ce numéro spécial s’interroge sur la relation entre opinion publique et action publique, comme une contribution à l’analyse de la capacité politique de l’Union européenne (UE). La réponse apportée par la littérature à cette interrogation centrale pour le fonctionnement de tout système démocratique (Dahl, 1989 ; Manin, 2012) est en grande majorité américaine (Stimson, 1998, 2004 ; Soroka et Wlezien, 2010 ; Druckman et Jacobs, 2015). Essentiellement fonctionnaliste, elle est soit formulée de manière normative – « Un des principes fondamentaux d’un gouvernement démocratique est que l’action publique doit être une fonction de l’opinion (…) Savoir si et jusqu’à quel point ce principe correspond à la réalité est un indicateur critique de la gouvernance représentative » (Wlezien et Soroka, 2007, 800) –, soit de manière pragmatique sous la forme du « Who leads whom ? » (Canes-Wrone, 2006). Partant du constat d’un recours de plus en plus courant aux enquêtes d’opinion par les gouvernants, cette seconde approche s’est développée au cours des vingt dernières années pour interroger l’usage des données d’opinion dans l’action publique (Enns et Wlezien, 2011). Quel rôle joue le recours à l’opinion publique dans la mise sur agenda, la prise de décision, mais aussi le discours politique ? Fait-elle figure d’aiguillon, constitue-t-elle une contrainte ou au contraire une opportunité pour les gouvernants ? Comment se matérialise le recours à l’opinion, à travers quels dispositifs concrets, et quels en sont les usages et les effets en termes de capacité politique et d’action publique ? [Premier paragraphe de l’introduction]
Politique européenne. mars 2017, vol 2016/4, n° 54. ISSN 16236297. 202 p.
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